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SAPHIR

Saphir de Ratnapura, Sri Lanka

    Classe : Oxydes et hydroxydes
    Sous-classe : Oxydes
    Système cristallin : Rhomboédrique
    Chimie : Al2O3
    Abondance : Rare


L'appellation " saphir" désigne une variété gemme de corindon, de toute couleur autre que le rouge réservé au rubis. La teinte la plus connue est le bleu profond mais les teintes vertes, jaunes, rose-orangé (variété "paparadscha") ou violettes ne sont pas rares. La couleur du saphir résulte de la présence de traces de fer et/ou de titane dans son réseau cristallin, en substitution de l'aluminium. Il doit son nom au grec sappheiros, d'origine sémitique, désignant ce minéral connu depuis l'Antiquité. Le saphir se rencontre essentiellement dans les alluvions gemmifères. On le connaît beaucoup plus rarement dans les gisements primaires qui peuvent être très variés : syénites, syénites néphéliniques, certaines monzonites et pegmatitesgranulitesgneiss et micaschistes alumineux, roches calcaires et dolomitiques du métamorphisme de contact, notamment les marbres alumineux, xénolites de roches volcaniques, etc... Les saphirs d'origine volcanique (xénolite) ayant donc séjourné dans une lave basaltique sont riches en fer et naturellement bleu ou vert plus foncé que leurs homologues d'origine métamorphique. Le saphir se présente généralement en cristaux pseudohexagonaux, ils adoptent des formes de pyramides aigües ou tronquées, de prismes courts, de tonnelets ou de barillets à faces parfois striées ; on le rencontre également en grains arrondis. Le saphir est un minéral estimé et inlassablement recherché depuis des temps très reculés. La grande épopée poétique indienne du Ramayana relate brièvement la naissance des saphirs : les deux yeux, d'un bleu profond magnifique, tombés dans la rivière, de la divinité Daitya. Depuis, ces joyaux abondent dans les rivières de ce pays. En France le saphir de Haute-Loire était très prisé des bijoutiers et orfèvres de l'Antiquité. On le retrouve ainsi sur des bijoux du IIème siècle et le trésor Gallo-Romain de "la Dame de Lyon" comprend un collier à saphirs bleus récoltés au Mont Coupet, près de Langeac. Cet engouement pour les saphirs de Haute-Loire traverse tout le Moyen-Âge : ils sont cités dans les lapidaires d'Albert le Grand (XIIème siècle) et dans ceux dits du Roi Philippe au XIVème siècle. Ils ornent nombre de bijoux religieux de cette époque et figurent sur le superbe évangéliaire de l'Apocalypse, aujourd'hui à la Bibliothèque Nationale. Les saphirs (out comme les rubis), étaient sensés porter bonheur et posséder de multiples vertus aussi variées que de "purifier le sang, résister au venin, fortifier le coeur, arrêter les hémorragies, etc...". Ces croyances tri-millénaires ne commenceront à n'être égratignées qu'en 1696, dans le dictionnaire universel des drogues simples de Nicolas Lémery.

Saphir prismatique de Tranomaro, Madagascar
Saphir du Riou Pezzouillou, Haute-Loire, France
Saphir bleu de Ratnapura, Sri Lanka
Saphir jaune de Ratnapura, Sri Lanka

Le saphir dans le Monde

Les plus beaux saphirs au Monde, d'un bleu soutenu, provenaient du cirque glaciaire de Sumjan (Cachemir, Inde), où les pierres, surtout extraites vers 1880, donnaient d'exceptionnels barillets dépassant parfois le kilogramme.

Actuellement, les champs d'alluvions gemmifères du Sri Lanka (Ratnapura et Elahera) fournissent les plus belles pierres : des saphirs bleus et des "paparadscha", ainsi que des gemmes vertes, jaunes et parfois des étoilés. L'étoile de Bombay, conservé au Smithsonian Institute de Washington, est un superbe exemple de saphir étoilé de 99 carats découvert dans ces gisements. Des cristaux bleus biterminé parfaits (photo principale) peuvent y dépasser les 20 cm !

Les alluvions du Cambodge (Pailin) et de Thaïlande (Bo-Phloy, Trat et Ban-Kha-Cha), produisent également de superbes pierres. L'Australie, la Colombie, le Kenya, la Tanzanie et les USA recèlent également des gisements exploités.

Le saphir en France

En France, le Riou Pezzouillou, près du Puy-en-Velay (Haute-Loire) a fournit des cristaux pierreux centimétriques verts et bleus, ainsi que des petits cristaux gemmes qui ont pu être taillés, le tout associé à des zircons rouges. Ces minéraux sont issus du démantelement d'une brèche volcanique à fragments de socle profond. Le Mont Coupet, volcan situé près de Langeac (Haute-Loire), a donné des saphirs bleus également issus d'une brèche volcanique. On retrouve aussi des saphirs dans le volcanisme de Limagne de la région d'Issoire (Puy-de-Dôme) de plus de 100 ct, dont certains suffisament transparent ont pu être taillés en gemmes de plus de 5 ct !!! D'une manière générale on retrouve le saphir dans la plupart des cours d'eau recoupant des roches volcaniques, il est très présent dans le Cantal ; le Sioulot (Massif du Mont-Dore, Puy-de-Dôme) a également fourni de superbes cristaux gemmes parfaitement formés mais qui ne dépassent pas les quelques millimètres.

Les macles et l'astérisme

  • Saphir maclé du Sri Lanka
  • Saphir maclé du Sri Lanka
  • Saphir maclé du Sri Lanka
  • Saphir maclé du Sri Lanka

Les macles sont communes sur {1011} ; habituellement lamellaire. Moins communes on note les macles par interpénétrations des cristaux tabulaires sur {1120}, formant des croix ou des pointes de flèche (photos de droite).

Le saphir peut également présenter un
astérisme, on parle alors de saphirs étoilés. Lorsqu’on les observe sous la lumière d'un spot, une étoile à 4, 6 ou 12 branches apparaît à la surface de la gemme. C’est le reflet de la lumière sur des inclusions de rutile et/ou d'hématite qui est à l’origine de ce phénomène. Le plus souvent ont rencontre des étoiles à 6 branches et lorsque l'astérisme est dû à l'hématite le saphir est noir. Les fines aiguilles de rutile sont réparties parallèlement selon trois axes qui se croisent à 120° dans la pierre. Seule la taille en cabochon permet de révéler l’astérisme d’une gemme. Pour cela, la base du cabochon doit être parallèle aux inclusions de rutile et/ou d'hématite. Comme toutes les pierres étoilées, les saphirs les plus recherchés sont ceux dont l’étoile est entière, bien centrée sur la gemme, et la plus précise et fine possible.

Saphir étoilé de 4,41 ct de Thaïlande
Saphir étoilé de Thaïlande (étoile à 12 branches)
Aiguilles de rutile dans saphir du Sri Lanka
Aiguilles de rutile dans saphir du Sri Lanka

Traitements des saphirs naturels :

Du fait de sa très grande importante sur le marché des gemmes et de sa renommée mondiale pour une production de qualité joaillerie relativement faible, le saphir est énormément traité et synthétisé. Nous allons tenter ci-après d'établir une liste exhaustive de tout ce qu'il se fait autour de ce minéral. 

La chauffe :

Environ 95% des saphirs naturels facettés du marché sont aujourd'hui chauffés. Ce processus est utilisé pour développer ou intensifier la couleur en supprimant ou en atténuant les zonations. Ce traitement peut aussi affecter la clarté de la pierre en supprimant ou réduisant les inclusions. La chauffe est très largement acceptée par le marché. Ceci explique la grande valeur et rareté des pierres non traitée. Ce traitement peut générer des fractures discoïdales autour des inclusions présentes dans le saphir ; des halos bleus peuvent également apparaître autour des inclusions de rutile dus à la diffusion de titane dans le saphir hôte, attention cependant les indices d'une chauffe peuvent aussi cacher une diffusion ou un remplissage de fracture (détaillés ci-après). Il faut également garder à l'esprit que les saphirs d'origine volcanique sont naturellement chauffés par les magmas qui les remontent des profondeurs...

La chauffe et le refroidissement contrôlé et lent peuvent également générer un astérisme dans certaines pierres translucides en permettant la recristallisation
épitaxiale (orientée) de rutile au sein même du saphir.

Fractures discoïdales autour d'inclusions témoins d'une chauffe - © AIGS
Diffusion de titane autour d'inclusions de rutile
© Lotus Gemology Bangkok
Fracture discoïdale autour d'une inclusion témoin de la chauffe - © AIGS
Fractures discoïdales autour d'inclusions témoins d'une chauffe - © AIGS

Le "fracture filling" (ou remplissage de fractures) :

C'est une technique développée dans les années 90 afin de rendre commercialisable certains rubis très fracturés de Mong Hsu (Myanmar). Cette technique consistent à injecter à haute température et "cicatriser" les fractures avec un verre (généralement au plomb) de même indice de réfraction que le saphir afin de lui redonner toute sa transparence. La valeur des saphirs traités avec cette technique est fortement affectée. Il n'est pas toujours évident surtout pour le néophyte de repérer ce traitement. Généralement les gros saphirs roses, orange-rouge ou bleus dont les fractures naturelles atteignent la surface de la gemme sont traités avec cette technique.

Ce traitement peut aussi être réalisé à température ambiante par injection d'huile colorée ou d'epoxy, le traitement n'est alors pas stable.

La diffusion au titane ou au beryllium :

Ce traitement est relativement nouveau est très difficile à repérer, il consiste à porter la gemme à très haute température en présence de titane afin de faire diffuser ce titane à l'intérieur de la pierre et en modifier sa couleur. Ce traitement est généralement réalisé sur des pierres dont la couleur n'est pas très intense afin de la doper. Il est possible en immergeant le saphir dans de l'eau, de voir que la diffusion n'est pas parvenu jusqu'au coeur, on note alors une auréole bleue sur la bordure extérieure de la gemme, qui perd en intensité vers le centre. De même, la couleur bleu se retrouve concentrée sur les arêtes de la gemme. Cette opération est aussi réalisé avec du béryllium qui pénètre plus facilement au coeur de la pierre pour donner des teintes rose-orangé. Sur les gemmes de petites tailles le traitement pénètre jusqu'au coeur, il est alors impossible de l'identifier sans technique avancée de laboratoire. Ce traitement peut générer une fluorescence laiteuse aux UV.

Saphir traité verre au plomb avec bulle de gaz.
© www.inclusiopedia.com
Diffusion au béryllium superficielle d'un saphir rose
© Lotus Gemology Bangkok
Diffusion au titane superficielle d'un saphir
© Lotus Gemology Bangkok
Saphir jaune de 0,36 ct du Sri Lanka chauffé

Saphirs synthétiques :

Le flame-fusion (ou Verneuil) :

C'est un scientifique Français du nom d'Auguste Verneuil qui a mis au point ce procédé afin de synthétiser le rubis en laboratoire dès 1902. A cette époque il était impossible de faire la différence entre le vrai du faux ce qui affecta considérablement la valeur de cette gemme. Le procédé permet aussi de synthétiser des saphirs bleus, de la poudre d'alumine et de titane est fondue à la flamme dans un four, les grains fondus tombent sur un socle rotatif, ce qui forme une "boule" de saphir synthétique. Ce procédé est aussi utilisé pour fabriquer n'importe quel type de corindon ou de spinelle, il permet de créer des gemmes parfaitement transparentes très propre à l'oeil. Cependant sous magnification, ces gemmes synthétiques présentent des lignes de croissance courbes, que l'on ne rencontre pas dans la nature ; la gemme présente aussi des micro-bulles d'air, elles aussi totalement absentes des gemmes naturelles. Le schéma de droite présente le procédé - Copyright Peter Johnston / GIA


Courbes de croissance des saphirs Verneuil
© Lotus Gemology Bangkok
Lignes de croissance courbes d'un saphir synthétique
© Lotus Gemology Bangkok
"Boules brutes" de saphir Verneuil de différentes couleurs
© Theodore W. Gray
Rubis synthétique Verneuil facetté de 6,15 ct

Le pulling :

La méthode dite du "pulling" est apparu en 1918. Elle a permis de produire des rubis synthétiques avec moins de marques internes de croissance mais aussi de bien plus grande taille (40 cm de long pour plus de 10 cm de large). Le pulling est une technique plus complexe et plus chère à mettre en place, mais elle permet aussi de produire des cristaux synthétiques plus rapidement. L'apparition et l'expansion des lasers dans les années 60 ont grandement contribué au développement de cette méthode afin d'obtenir des cristaux avec le moins de défaut interne possible. Ce procédé est aussi connu sous le nom de "méthode de Czochralski". Elle consiste a faire fondre l'alumine et du titane dans un creuset, un petit cristal de corindon est fixé à un bâton puis mis en contact avec la surface du liquide fondu afin d'initier le processus de croissance. Le bâton tourne sur lui même et est retiré de la surface du liquide au fur et à mesure que le saphir cristallise afin de former tout comme la méthode de Verneuil, une "boule". D'autres gemmes que le rubis sont synthétisées via cette méthode comme les alexandrites, les chrysobéryls, les rubis étoilés ou non, ainsi que les YAG (grenats à l'yttrium-aluminium) et GGG (grenat au gadolinium-gallium) qui imitent le diamant. Schéma de droite présentant le procédé - Copyright Peter Johnston / GIA

Le flux :

La méthode dite de croissance par "flux" a été développée dans les années 30 afin de synthéthiser l'émeraude, aujourd'hui elle permet aussi de synthétiser d'autres gemmes tels que rubis, saphirs, alexandrites et spinelles... Cette méthode est très coûteuse et lente. Des nutriments sont dissous par des produits chimiques dans un creuset en or ou en platine puis chauffés à haute température. Ils sont ensuite refroidis très lentement afin que des cristaux se forment. Des inclusions caractéristiques en volutes de fumée sont toujours visibles.

Faux cristaux de saphir :

Les larges cristaux de corindon africain peuvent être enduit d'un plastique bleu afin de leur donner un aspect attrayant. A l'origine ces cristaux sont gris-bleu voire marron : lire notre article à ce sujet ici : Rubis et saphirs teintés



Dureté : 9
Densité : 3,98 à 4,1
Cassure : Irrégulière à conchoïdale
Trace : Blanche



TP : Opaque à transparent
IR : 1,759 à 1,772
Biréfringence : 0,008 à 0,009
Caractère optique : Uniaxe -
Pléochroïsme : Faible
Fluorescence : Varaible


Solubilité : Aucune

Magnétisme : Aucun
Radioactivité : Aucune